Vor 2 Monaten
Auditorium Ansermet
Lemanic Modern Ensemble
Le premier concert d’abonnement du LME présente trois aspects du jeu en musique : le jeu « classique » propre au concerto entre un soliste et un orchestre, le jeu visuel du miroir dont Alborada del Gracioso est un exemple plein d’ironie, puis le jeu lui-même, plus précisément le poker, comme cadre dramatique en tant que tel. Œuvre de maturité, le concerto pour violoncelle de Frank Martin a connu une gestation lente et difficile. Au début des années 60 le compositeur compose une phrase simple pour violoncelle seul. Cette phrase, presque entièrement pentatonique et d’une grande expressivité, restera durant cinq années sans suite. C’est en 1965 que Frank Martin invente une autre ligne mélodique à l’orchestre répondant à la première du violoncelle. Un dialogue commence à vivre et l’œuvre peut alors devenir Concerto. Elle est dédiée à Paul Sacher qui en assure la création à Bâle en 1967 avec Pierre Fournier. Maurice Ravel compose en 1905 ses célèbres Miroirs, 5 pièces pour piano. Alborada del gracioso, dont le LME présente une relecture pour ensemble réalisée par Luis Naón, en est la 4ème partie. L'intention du compositeur est de présenter les images de cinq personnages différents se regardant chacun dans un miroir. Ainsi chaque pièce est dédiée à un membre des « Apaches », cercle d'amateurs d'arts se réunissant régulièrement à Paris autour de Ravel. Alborada del gracioso (Aubade du bouffon) est dédiée à l’écrivain Calvocoressi dont Ravel mit certains textes en musique. Pièce à la fois chatoyante et sarcastique, elle est une sorte de caricature savante de l'ibérisme traditionnel, qui intègre des thèmes musicaux espagnols dans des mélodies complexes. Ravel en réalisa une orchestration en 1919. Joueur invétéré, Igor Stravinsky a un jour eu l’idée de mettre en scène une partie de Poker sous la forme d’un ballet. Commande de l’American Ballet de New York, ce ballet – Jeu de Cartes – est créé au Metropolitan Opera de cette ville en 1936 sous la direction du compositeur. L’œuvre est structurée en trois partie, représentant trois « donnes ». Une même introduction solennelle ouvre chaque donne, puis les situations de jeu se compliquent créant la dramaturgie de l’œuvre. Lors de la création, certaines cartes sont jouées et dansées, comme le Joker dont le rôle est confié à William Dollar (nom prédestiné pour Stravinsky). Composée durant la période néo-classique du compositeur, « Jeu de Cartes est l’une des œuvres les plus éclectiques de Stravinsky » explique André Boucourechliev, indiquant un nombre important de souvenirs et de références (André Boucourechliev in Igor Stravinsky, éditions Fayard 1982). On peut mentionner par exemple la citation de l’ouverture rossinienne du Barbier de Séville lors du « Combat des piques et des cœurs ». Composée pour orchestre de chambre, l’œuvre est proposée par le LME dans une relecture pour ensemble – version de concert – réalisée en 2024 par Dimitri Soudoplatoff.